Depuis quelques mois, un collectif montréalais s’est créé dans le but de fonder une librairie féministe. Un projet qui prend de l’ampleur et qui révèle un intérêt et un besoin de la part de la communauté. Aujourd’hui, le regroupement envisage les choses sérieusement et souhaite ouvrir les portes de la librairie d’ici un an.
C’est autour d’un regroupement d’une petite dizaine de personnes aux statuts variés (libraires, étudiant(e)s en littérature, etc.) que s’est formé le projet de librairie féministe. Tout a commencé presque par hasard lorsque Marie-Ève, libraire, constatant qu’un collègue avait mal classé Une chambre à soi de Virginia Woolf, propose d’ouvrir une librairie spécialisée. Même si le sujet a longtemps fait partie des conversations et des centres d’intérêt de son entourage, elle constate que l’idée est restée sans suite. Pourtant, depuis la suggestion et la création du collectif, tout semble s’emballer, et après 4 rencontres, il est déjà question d’un échéancier.
/ Une librairie exigeante au féminisme inclusif
Cette librairie se veut un espace commun et collectif représentatif des différents courants LGBTQ et féministes. En effet, Marie-Ève se rappelle que « le dernier exemple de librairie féministe et LGBTQ s’appelait l’ « Androgyne ». Selon ceux qui ont étudié la situation des librairies au Québec, la raison principale de sa longévité était la diversité de son offre. Pour nous ce qui est vraiment important, c’est d’être capables d’être et de rester ouverts à différents types de féminismes ».
Il s’agit pour le collectif de penser les féminismes au sens large, de s’intéresser à d’autres minorités en couvrant également des réflexions anti-racistes, anti-colonialistes et de « proposer divers types d’ouvrages autant théoriques que littéraires qui ne s’arrêteraient pas forcément au fait que ce sont des femmes qui les écrivent ».
L’important est que la librairie permette de penser des oppressions spécifiques mais aussi de confronter des points de vue, autrement dit d’entendre toutes les voix qui peuvent exister sans en privilégier une en particulier.
/ Quels possibles?
S’il y a déjà eu quelques librairies féministes à Montréal, elles ont dû fermer après les années 70/80 à cause des dissensions entre les courants de pensées, de l’augmentation du prix des livres, des loyers, etc. Aujourd’hui, on pourrait penser que le féminisme ne présente plus d’intérêt aux yeux de la communauté et qu’il souffre encore d’a priori qui pourraient lui nuire. Pourtant, comme le souligne Marie-Ève : « Je me suis rendue compte qu’il y avait vraiment beaucoup de monde qui avait en tête de partir ça et qu’il y a beaucoup de gens qui sont prêts à investir, à être solidaires, à participer, à être bénévoles, à faire la bouffe, à faire à peu près n’importe quoi pour qu’il y ait une librairie féministe, pour faire exister cette diversité de bouquins, autant en bande dessinés, livres jeunesse, poésie et pour créer un lieu de rencontre, de discussions, de débats au-delà des idées reçues.
La littérature permet la création. »
Aussi, après de nombreuses rencontres comme avec la librairie Violette and Co à Paris ou les Éditions du remue-ménage, le collectif souhaite continuer son réseautage, notamment auprès d’organismes communautaires comme la FFQ (Fédération des femmes du Québec), de chaires universitaires comme l’IREF (Institut de recherches et d’études féministes) et de professeurs engagés, avant de se lancer dans sa campagne de financement.
Le projet d’une librairie féministe, accessible et visible, valorisant les libertés individuelles et plurielles, offrant le choix de choisir, exigeante quant au contenu des ouvrages et souhaitant mettre en avant l’importance du métier de libraire, pourrait donc bien voir le jour d’ici 2016.
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Par Delphine Cézard