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Annie Guglia – L’importance des modèles

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Classée 12e au rang mondial des skateboardeuses, la montréalaise Annie Guglia se distingue dans un sport unique qui repousse sans cesse les limites. Elle fait partie des quelques adeptes au féminin qui pratiquent le skateboard au niveau professionnel. Inspirée par des « skateuses » à un jeune âge, elle inspire maintenant les générations futures.

Entrevue

1- Pour commencer, qu’est-ce qui t’a amenée à pratiquer le skateboard?

Le skateboard est entré dans ma vie par la bande. En fait, c’est mon petit frère qui a reçu un skate pour Noël en 2000. En 2001, il en faisait dans la rue et au Parc Ahuntsic avec ses amis, et je trouvais ça vraiment cool. Je les suivais partout. L’année suivante, j’ai eu un skate pour ma fête – ou Noël aussi. À partir de là, je me suis fait des amis, j’ai commencé à apprendre des trucs et je n’ai jamais arrêté.

J’ai toujours été quelqu’un qui a besoin de bouger. Mon voisin d’en face m’appelait « la petite sauterelle », et mes parents, leur tornade haha!Le skate, c’était parfait pour moi.

2- Avais-tu des modèles féminins qui pratiquaient le skateboard dans ta jeunesse? Ou des modèles dans d’autres sports/domaines?

À l’époque, la visibilité féminine était assez restreinte, il y avait tellement peu de filles qui skataient. Mon premier contact avec une « skateuse », comme pour bien des gens d’ailleurs, c’était Elissa Steamer dans le jeu de Playstation Tony Hawk Pro Skater 1. Ensuite, à l’été 2002, j’ai rencontré Anne-Sophie Julien en personne au parc Ahuntsic. J’étais vraiment impressionnée parce qu’elle était capable de skater le half-pipe. C’était mon idole.

Au printemps 2013, j’ai lu une entrevue de Margaux Walker dans la première édition d’Exposé Magazine. Ma seconde idole! Puis, j’ai entendu parler de filles en Californie via le film Getting Nowhere Faster (2004). En 2005, je suis montée à Toronto avec Anne-Sophie, Margaux et d’autres filles de Montréal pour le West 49 Canadian Open et je les ai rencontrées : Vanessa Torres, Amy Caron, Lacey Baker, Lyn-Z Adams, toutes les « pro skateuses » de l’époque étaient là. Je m’étais classé 9ème sur 14 dans cette compétition-là. J’avais 15 ans, je vivais mon rêve de skater avec toutes mes idoles.

Je trouve que c’est important, autant dans la vie qu’en skate, d’avoir des modèles /idoles auxquels s’identifier. Ça permet d’apprendre et de s’améliorer beaucoup plus rapidement. Pour ma part, toutes ces filles-là, et plusieurs gars aussi par ailleurs, ont joué un grand rôle dans mon développement en tant que skateuse.

3- Qu’est-ce que tu aimes le plus de ce sport?

Premièrement, le skate, c’est un outil social qui te permet de te connecter avec une communauté de gens qui partagent la même passion que toi. Personnellement, les trois-quarts de mes ami(e)s, je les ai rencontré(e)s à travers le skate. Quand je voyage, même à Barcelone, Berlin ou New York, peu importe où je vais, j’amène mon skate pis je rencontre des gens qui me ressemblent à travers le monde.

Deuxièmement, j’aime les qualités que ça permet de développer et que tu peux par la suite appliquer dans d’autres facettes de ta vie. Le skate, ça peut sembler banal et enfantin, mais c’est un sport très technique et difficile à apprendre. Ça nécessite de la patience et de la persévérance, qui sont deux vertus… qui s’apprennent! Le skate, ça t’apprend qu’il n’y a rien de facile dans la vie et que tu dois travailler pour avoir ce que tu veux.

Finalement, même si le skate se pratique habituellement en gang, ça reste un sport individuel. Contrairement aux sports d’équipe, si tu as une mauvaise journée, ça ne regarde personne d’autre que toi. Tu n’as pas d’entraineur, pas d’arbitre, pas de règles, pas de « période de skate prédéterminée ». Si ça ne te tente pas de skater aujourd’hui, tu ne skates pas. Si tu en as envie, tu sors ton board et tu y vas! Si tu rates quelque chose, tu ne peux blâmer personne sauf toi… Personnellement, je joue aussi à la balle-molle. Ça permet de développer d’autres aspects de la personnalité, comme le travail et l’esprit d’équipe, la stratégie, etc. mais en skate, tu es pas mal plus indépendant et « libre ».

4- Crois-tu que les femmes qui pratiquent le skate s’entraident? De quelle manière?

Absolument. Les skaters en général s’entraident beaucoup. D’après moi, on a moins l’esprit compétitif que dans bien d’autres sports. Les gens qui sont en compétition sont souvent des amis qui skatent ensemble le reste de l’année, tant les filles que les gars. Et si tu regardes une compétition de skate, tu remarqueras que les skaters s’encouragent mutuellement pendant leurs runs, c’est assez drôle vu de l’extérieur. Tu ne verrais jamais ça en ski de bosse par exemple. Même hors compétition, l’entraide fait partie de la sous-culture du skate. Les gens se montrent des nouveaux trucs tous les jours.

Entre filles, je pense qu’on a particulièrement intérêt à se regrouper et à s’entraider puisqu’on est minoritaires. Plus il y a de filles, plus ça permet de créer de l’engouement et d’encourager d’autres filles à skater. Si on arrive une gang de 10 filles, même celles qui sont moins habituées vont se sentir à l’aise de skater sans se faire juger.

5- Selon toi, qu’est-ce ça prend pour être un bon modèle?

Il faut prêcher par l’exemple, peu importe ce que ça implique. Dans le skate, ça peut être d’avoir le meilleur style ou la meilleure attitude, alors qu’être un bon modèle LGBT, vu qu’on est là-dedans, ça peut être de montrer aux jeunes que ce n’est pas la fin du monde, que ça ne devrait même pas être un problème! Montrer aux jeunes que c’est important d’être toi-même, même si certains ne t’acceptent pas.

Une bonne façon de lutter contre l’homophobie, c’est aussi en diffusant des modèles positifs lesbiens auxquels les gens vont vouloir s’identifier et qui créeront un certain engouement. Je ne veux pas dire qu’il faille rendre l’homosexualité « trendy », mais je suis convaincue qu’ils y a beaucoup de filles qui se sentent moins « bizarres » d’être lesbiennes en voyant que leurs amies hétéros fantasment sur Ruby Rose.

6- Quelle est la destination de rêve pour tout adepte du skateboard?

La Californie, ça c’est sur. Et plus précisément aux alentours de Los Angeles. Sinon, il y a aussi Barcelone, qui est une grosse ville-skateparc. L’architecture fait que tout y est skatable, c’est vraiment le paradis. J’y suis allée deux fois. Mais personnellement, mes destinations de rêve c’est San Francisco ou Portland, Oregon. J’ai fait les deux l’an passé et tant pour le skate que pour les gens et l’énergie de la ville, moi j’ai trippé.

7- Le plus beau moment de ta carrière?

Il y en a eu pas mal! J’aurais tendance à dire les deux grosses tournées qu’on a fait avec les Skirtboarders (www.skirtboarders.com), soit « Skirtboarders au Mexique » et « Crossing Boarders Canada/Suède ».

En 2008 au Mexique, on était perçues comme des rockstars! Il y avait des centaines de personnes à chaque démo, ça faisait la file pendant une heure pour avoir notre autographe, c’était ma-la-de. On ne comprenait rien. Crossing Boarders, c’était différent. C’est un échange qu’on a fait entre Skirtboarders et No Limit, une bande de filles qui skatent en Suède. Elles sont venues 2 semaines ici, on a fait une tournée d’Ottawa à La Have, en Nouvelle-Écosse. Ensuite, on est parties deux semaines là-bas en 2010, on a voyagé de Umeå à Malmö. C’était tellement l’fun d’être 25 folles dans un autobus à voyager d’un skateparc à l’autre!

Je me souviens aussi ma première fois en Californie avec les filles de The Side Project (Lisa Whitaker, Leticia Bufoni, Amy Caron, Lacey Baker, etc.).

8- Quels sont tes projets pour l’avenir?

Présentement, je suis en rédaction de mon mémoire qui s’intitule : Analyse du discours des groupes stratégiques dans l’industrie du skateboard en Amérique du Nord. Depuis janvier, je travaille là-dessus à temps plein, et j’espère finir d’ici avril prochain. Je commence mon terrain éminemment. Je vais aller interviewer des hauts dirigeants de compagnies de skate partout en Amérique du Nord, pour tracer un portait de l’industrie à travers le point de vue de ses principaux acteurs. Ça va être super intéressant! Par la suite, j’aimerais bien me positionner dans cette industrie-là, mais je n’ai pas encore de plan de carrière prédéfini.

Dans un autre ordre d’idées, je viens de rentrer sur le team Technical Skateboards, une petite PME québécoise qui fabriquent des skates, donnent des cours de skate, organisent des événements, des démos, des compétitions, etc. J’aimerais bien m’affilier avec eux, donner des cours de skate et développer ça à court-moyen-long terme.

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