LSTW vous présente Caroline Mauxion. C’est dans le cadre de son exposition à la Galerie Simon Blais, qui s’étire jusqu’au 29 août, que nous avons posé quelques questions à cette étudiante à la maîtrise en arts visuels et médiatiques à l’UQAM.
Entrevue
1- Caroline, tu as gagné le Prix Sylvie et Simon Blais pour la relève en arts visuels 2015, comment décrirais-tu ton art?
Je parle de reprendre contact avec mes photographies quand toutes ces dernières sont désormais appréhendées sur écran. Il est devenu presque ordinaire de réaliser une image tandis que la matérialiser s’est raréfié. L’image fétiche pliée dans le portefeuille est remplacée par un fond d’écran. Partant de ce constat, mes derniers projets ont consisté à installer mes images dans leur lieu d’exposition, comme des objets que je manipule et que je mets en espace. Je parle de déplacer mes images. Je rephotographie ensuite ces installations, créant des sortes de mises en abyme. Les images que je rephotographie viennent de mon atelier. Ce peut être des tests, des projets ratés, comme une manière de recycler ces images déjà produites.
2- Ton médium est la photographie; te considères-tu plus comme une artiste en arts visuels ou comme une photographe?
Je pense que les deux ne sont pas incompatibles. La photographie a été mon premier médium de création et l’acte photographique nourrit ma réflexion actuelle sur l’image. Mais je travaille aussi l’installation et la vidéo.
3- Crois-tu que les femmes dans le monde des arts visuels s’entraident? De quelle manière?
Avec un centre d’artiste féministe comme La Centrale, une communauté d’artistes femmes se créée grâce aux membres. C’est important quand on pense à la sous-représentation des femmes artistes dans les collections de musées aujourd’hui encore. Je crois toutefois à la rencontre de pratiques d’artistes plutôt qu’à un art systématiquement genré.
4- Quelles sont les émotions qui te rapprochent le plus de ton art? Qu’est-ce qui t’inspire la création?
Comment traduire une pensée, une sensation en tant qu’artiste visuel? L’écriture de Virginia Woolf reste une source d’inspiration, tant elle parvient à saisir par les mots l’insaisissable d’une pensée grâce aux couleurs et aux matières. Lorsque je suis dans mon atelier, j’attends le lieu et ce qui m’entoure. Je laisse les éléments se rencontrer, la lumière, les courants d’air peuvent être des points de départ.
5- Si tu pouvais partager un espace en galerie avec un/une artiste, qui choisirais-tu et pourquoi?
Je pense au travail de Letha Wilson pour sa recherche sculpturale autour de l’image photographique.
6- Qu’est-ce qui distingue Montréal de Paris? Paris de Montréal?
Je pense qu’il y a plus de place à Montréal pour émerger en tant qu’artiste, notamment grâce à la présence des centres d’artistes qui travaillent à représenter une diversité artistique. Je dirais aussi que les pratiques sont moins formatées comme ça peut parfois être le cas à Paris où la majorité des étudiants sort des Beaux Arts.
7- Parles-nous de ton travail qui est présentement exposé à la Galerie Simon Blais.
Cette exposition est mon troisième déplacement. Il s’intitule l’ombre au tableau – déplacement #3. Toutes les images ont été réalisées à la galerie Simon Blais. Habituellement, les galeries sont des cubes blancs, je trouvais ici intéressant d’exploiter cette grande fenêtre présente dans la salle d’exposition. C’est donc la lumière naturelle de la galerie qui a généré ces images. La série Indice est constituée d’images réalisées dans mon atelier, d’objets que j’ai photographiés sur fonds de couleur. J’ai accroché ces images la face contre le mur de la galerie. L’image de l’objet représenté est donc cachée. Ne reste que la couleur de fond qui crée une ombre irisée sur le mur. J’ai ainsi photographié ces images face aux mur.
Les œuvres intitulées Passage sont des monochromes bleus, issus d’un projet abandonné, que j’ai photographiés à multiple reprises, lors de mes déplacements. La lumière sur ces aplats de couleur crée des réflections aux teintes mauves que j’ai à nouveau photographier, laissant également apparaître la trace de mes doigts ou des cassures lors de leurs manipulations.
8- Que désires-tu pour les années à venir?
J’aimerais avancer mes recherches et explorer l’installation d’images photographiques dans l’espace. Et j’aimerais beaucoup pouvoir exposer à l’étranger!
Mauxion aura droit en février 2016 à une exposition à la Galerie de l’UQAM.
Par Florence Gagnon & Léonie LeBoeuf