Au Canada, le temps où un couple de même sexe ne pouvait pas obtenir la même reconnaissance de son union qu’un couple hétérosexuel semble déjà loin. Avec les récents événements survenus en Irlande et aux États-Unis, le mariage gai a même pris une place prépondérante dans les médias, répandant un peu plus le rêve de l’égalité au sein de la communauté mondiale. Pourtant, dans certains endroits, il reste bien du chemin à parcourir pour atteindre cet objectif. Nous avons voulu comprendre quels sont les obstacles au mariage gai qui perdurent.
Il suffit de surfer sur internet pour se rendre compte de la pléthore d’arguments pour et contre le mariage gay, mais le débat est différent dans chaque régions. Les blocages en sont d’autant plus divers et complexes.
(Re)Définir la famille
Les impacts de la redéfinition de la famille sur le bien-être des enfants sont souvent utilisés comme arguments contre le mariage gai.
De nombreuses études effectuées portent sur l’épanouissement d’enfants élevés au sein de familles qui ne correspondent pas au modèle du père et de la mère mariés ayant des rôles traditionnels. Selon un dossier sur l’homoparentalité de l’Ordre des Psychologue du Québec, plusieurs révèleraient que les enfants se développent aussi sainement dans ces conditions que dans des familles dites traditionnelles. Par ailleurs, ils affirment qu’aucune publication ne soutient la spécificité et l’indispensabilité des rôles parentaux en fonction du sexe.
Toutefois, des études scientifiques qui démontrent le contraire existent et perpétuent le doute et les préjugés. Elles se fonderaient toutefois sur des interprétations parfois critiquables des données de recherches, par leur ancrage dans des positions morales ou religieuses.
Les croyances religieuses.
Human Rights Campain (HRC), organisation pour les droits civils militant en faveur de l’égalité, présente les positions générales sur la question homosexuelle des multiples branches des principales religions.
L’église catholique romane condamne la discrimination légale des homosexuels, mais s’oppose au mariage de couples de même sexe. Elle attend des homosexuels qu’ils demeurent célibataires à vie, le mariage étant uniquement pour la procréation. L’homosexualité ne serait pas considérée comme un péché en soi, mais elle serait vue comme un trouble ou comme non naturelle.
L’Islam, qui n’a pas d’instance centrale de gouvernance, n’aurait pas de politique unique sur la question. Selon un article du Huffington Post, le droit islamique prohibe les rapports homosexuels, car ils menacent la définition de la famille. Certaines écoles prôneraient sa criminalisation avec peines pouvant allées jusqu’à la mort. Toutefois, de plus en plus d’érudits contemporains jugeraient que l’homosexuel qui ne passe pas à l’acte n’a pas à être persécuté ou discriminé.
Des quatre courants du Judaïsme, seuls les orthodoxes condamnent les relations homosexuelles et leur officialisation. D’après HRC, les réformés, comme les conservateurs et les reconstructionnistes, soutiennent la cause mais, à la différence de ces derniers, ils permettent aux rabbins de ne pas célébrer les mariages homosexuels si cela est contraire à leurs opinions.
Il demeure important de rappeler que l’ensemble des pratiquants d’une religion ne partagent pas tous les mêmes positions. Nombre de regroupements de différentes confessions sont inclusifs de la communauté LGBT et s’interrogent sur sa place et son intégration.
Une question d’avancement des droits de l’homme.
Le droit au mariage gai est un objectif qui ne peut être atteint qu’en parallèle à l’avancement général des droits de l’homme, car tous ces droits sont interdépendants. Ainsi, un individu doit, par exemple, avoir accès au travail, à la liberté d’expression, à la sécurité sociale et à l’éducation pour atteindre l’égalité.
Pour l’heure, on rencontre toujours des politiques discriminatoires et des lois qui criminalisent l’homosexualité dans bien des pays. Le plus récent rapport de l’International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans and Intersex Association présente en détails l’éventail des situations rencontrées par pays. On en retrouve qui interdisent, entre autres, la participation à des démonstrations publiques en violations aux valeurs familiales constitutionnellement établies ou la démonstration publique d’une relation amoureuse homosexuelle. Ailleurs, l’âge de consentement légal diffère selon que les rapports soient homosexuels ou hétérosexuel. Certains n’interdisent pas la discrimination à l’emploi. Etc.
Le cas des évangélistes.
Certains chrétiens évangélistes, quant à eux, militent de façon active à l’international où l’égalité n’est pas encore atteinte.
D’après un autre article du Huffington Post, la légalisation du mariage homosexuel aux États-Unis pourrait avoir insufflé un nouvel élan à leurs mouvements. Soutenant que l’homosexualité serait une attaque à la chrétienté, ils auraient trouvé des publics réceptifs en Afrique, en Russie et en Europe de l’Est pour promouvoir des politiques homophobes.
Qui plus est, on apprend dans un article de Political Research Associates qu’un regroupement nommé Alliance Defending Freedom (ADF) aurait pour mission de transformer les systèmes légaux par le « témoignage chrétien ». Avec ses quelques 2400 avocats dans 31 pays, ADF serait impliqué autant dans des cours nationales qu’internationales pour défendre des causes pro-vie et anti-LGBT.
Le défi de l’acceptation.
Enfin, apparemment, même quand le défi semble relevé, la bataille n’est pas complètement gagnée. La légalisation du mariage gai ne fait pas disparaître ses détracteurs.
Comme le souligne Angela Giampolo, avocate lesbienne, dans une entrevue accordée au magazine Curve « Égalité ne veut pas dire acceptation ». Dans le cas des États-Unis, où le mariage gai est légalisé depuis le 26 juin, le débat est maintenant de savoir où commence le droit au mariage et où se terminent les libertés religieuses.
Selon Me Giampolo, la majorité de la population soutient d’abord les libertés religieuses. Des militants travailleraient à ce qu’un droit soit accordé aux secteurs privé et public de pouvoir refuser de reconnaître le mariage d’un couple homosexuel sur la base de principes religieux ou moraux.
Du travail reste à faire.
Les cas présentés ci-haut ne sont que quelques exemples d’obstacles s’opposant à la légalisation et acceptation du mariage gai. Selon les contextes et les particularités locales, les débats diffèrent et les opposants au mariage gai ont généralement recours à une multitude d’arguments légaux, sociaux, moraux, identitaires et religieux. Difficile alors de discerner ce qui constitue une réaction homophobe déguisée en une sincère interrogation pour l’avenir.
Par Catherine Paul