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L’astrologie peut offrir des réponses à ceux et celles en quête de sens. Pour les personnes queers, elle peut aussi être un outil de résistance et de résilience.

« Tout le monde doit indiquer aux autres son signe du Soleil, son signe lunaire et son ascendant », a requis l’organisatrice de la soirée. Un groupe d’environ dix personnes (la majorité queer et dans la vingtaine) s’était réuni sur sa terrasse pour profiter de l’été en toute simplicité. Assis en cercle, nous avons procédé à la description de nos configurations célestes. Lorsque mon tour est arrivé, j’étais prête. J’avais été témoin de ces conversations à presque toutes les fêtes auxquelles j’avais assisté récemment (aucune n’avait pour thème l’astrologie) et j’avais compris que mémoriser une partie de ma carte du ciel pouvait être utile. « Je suis Gémeaux, ai-je commencé, avec une Lune en Scorpion et un… » « Oooh » m’a interrompue une femme à la tête rasée et portant un collier ras-du-cou. « Ça a tellement de sens pour une journaliste ».

Il semble que l’astrologie connaisse son heure de gloire. Au cours des dernières années, Internet a permis l’émergence d’astrologues célèbres, leur permettant de bâtir une fidèle communauté en ligne. Reine incontestée en la matière, Susan Miller, dont le portrait a été dressé par Vogue et Vanity Fair, rejoint plus de 6,5 millions de personnes à travers le monde avec les horoscopes mensuels qu’elle rédige pour sa plateforme Astrologyzone.com.

De récents sondages démontrent que l’astrologie s’est imposée dans la culture populaire chez nos voisins du sud. Les données compilées par la National Science Foundation en 2014 ont établi que presque la moitié des Américains pensent que l’astrologie est « très scientifique » ou « quasi scientifique » —et que la proportion de gens qui croient que l’astrologie n’est « pas du tout scientifique » est à son plus bas depuis 1983.

Les informations sur le nombre 
de personnes LGBTQ+ qui croient en l’astrologie sont, sans surprise, difficiles à trouver. Malgré tout, il y aurait un engouement pour une version queer
de la pratique. Aux États-Unis, la Conférence biennale de l’astrologie queer, lancée en 2013 et vouée à
 « interrompre l’hétéronormativité une galaxie à la fois », attire nombre de participants intéressés par des discussions sur des sujets tels que les archétypes astrologiques et la création d’une carte du ciel basée sur l’épidémie du sida. Pour les plus jeunes queers, cette nouvelle vague astrologique ne ressemble en rien au cliché hétéronormatif de compatibilité à la chéri-quel-est-ton-signe. Ils revendiquent la pratique pour eux- mêmes, l’utilisant comme outil de développement de communautés, d’autoréflexion et de guérison.

Shaunga Tagore, 33 ans, travaille comme astrologue professionnelle à Toronto depuis 2013. Elle lit les cartes du ciel qui, selon elle, peuvent offrir à ses clients une occasion d’introspection. « Je décris ça comme une consultation intuitive, dit-elle, l’astrologie peut aider les gens à se comprendre et à déterminer le genre de vie qu’ils souhaitent vivre ».

Quelqu’un de timide, qui se sent contraint de devenir sociable, peut être soulagé d’identifier plusieurs signes de Terre — couramment considérés comme casaniers — dans sa carte. « Lorsque les clients retrouvent des caractéristiques qui les inquiètent révélées comme des parties essentielles de leur identité, mentionne Tagore, cela peut être valorisant ».

Elle croit que ce constat est important pour tous, mais particulièrement pour ceux et celles dont l’identité de genre ou les sexualités sortent de la norme établie. « Simplement en étant queers, plusieurs d’entre nous avons fait l’expérience de se voir nier le droit d’être nous-mêmes, dit-elle. Je défends tout ce qui peut nous aider à mieux nous connaître ».

imageastrologie

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En offrant aux participants une façon nuancée de réfléchir à leur identité, l’astrologie peut être particulièrement utile auprès des jeunes queers, ou pour ceux et celles qui ont récemment affirmé leur identité. En 2016, l’astrologue montréalais Mars Gravida a animé des ateliers au Camp Ten Oaks, qui s’adresse aux jeunes âgés de 8 à 18 ans provenant de familles et d’identités queers et trans. Gravida a observé comment l’astrologie peut aider les enfants à se familiarisera à la communauté de façon légère et divertissante. À travers les mouvements et les positions des objets célestes, les participants LGBTQ+ peuvent découvrir le caractère pluriel de leur personnalité, leurs pulsions et leurs désirs, plutôt que d’avoir à se conformer à l’une des cinq lettres courantes de l’acronyme, un acte qui peut sembler intimidant.

« L’astrologie est beaucoup moins chargée politiquement que l’étiquetage, mentionne Gravida. On y retrouve beaucoup de profondeur avec moins de stigmatisation ou de conséquences ».

Les subtilités offertes par les astrologues peuvent également être sécurisantes quand vient le temps de parler d’attirance sentimentale. La Montréalaise Sydney Sheedy s’est montrée curieuse de la pratique lorsqu’elle a remarqué le nombre grandissant de queers s’intéressant à ce sujet. Elle souhaitait appliquer les principes de l’astrologie à sa vie amoureuse et était fascinée chaque fois que des amis analysaient sa carte du ciel lors de soirées : « L’astrologie me permet de m’exprimer sur ma sexualité en évitant les clichés », dit-elle.

Plutôt que de dépendre de termes réducteurs tels que « soft butch » ou « hard femme » pour décrire ce qu’elle recherche, Sheedy utilise l’astrologie pour parler d’amour ou d’attirance de façon moins axée sur les apparences (en tant que Sagit- taire, elle s’entend bien avec d’autres signes de Feu qui ont tendance à donner une même priorité à la spontanéité et au sens de l’initiative dans leurs relations). L’astrologie a également permis à Sheedy de se sentir plus intégrée dans la communauté queer. Cette pratique est une bonne manière de faire connaissance et rend ainsi les rencontres sociales moins ardues.

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Les communautés queers sont des zones de résistance et l’astrologie peut nous aider à déterminer nos rôles. L’étude des manières dont le cosmos nous façonne est un exercice d’autoréflexion. Un regard honnête sur nos forces, nos faiblesses, nos besoins et nos limites peut aider
les personnes queers à déterminer comment nous pouvons contribuer aux communautés que nous
bâtissons — que nos personnalités nous mettent à l’avant-scène ou
dans les coulisses — et nous faire sentir aptes à le faire.

« Plusieurs d’entre nous rêvent et se battent pour un monde meilleur, lance Tagore. Je ne pense pas que nous puissions réellement rendre ça possible à moins de nous analyser attentivement — ce que nous voulons de la vie, nos valeurs et nos croyances ».

Texte: Megan Jones
Illustration: Catherine Potvin

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